2ème épisode : la mécanique


Mars 1986 : le reste de l'instrument vient d' arriver !
Mon coeur bat très fort lorsque je prends cette photo. Qu'y a-t'il dans cette caisse ? La momie de Rascar Capac ? Un clavecin ravagé par le transport ?


Tout mon avenir me semble caché dans cette boite étiquetée "fragile"...

Mais non, tout va bien. Dans la version "à terminer soi-même" le plus délicat est fait : la caisse est assemblée, la table d'harmonie est collée...

Heureux, j'aligne tout ce que j'ai sorti de la boite. C'est l'euphorie. "Un pied ! des sautereaux ! et là, le pupitre ! oh ! la jolie clef d'accord !"
Je prends la photo puis recommence à me demander ce qui m'a pris de me lancer dans un truc pareil. Il y a quand même là un certain nombre de bidules dont je ne m'explique pas du tout la forme...

Au travail ! Collage des barres sur le couvercle...

Teinture : gomelaque à l'intérieur et brou de noix (aussi sombre que possible) à l'extérieur.


Si seulement j'avais le budget pour copier la décoration du Desruisseaux admiré au musée du CNSM de Paris ! Avec sa pointe arrondie mon clavecin lui ressemblerait comme un frère. 

Sur les instruments anciens, le couvercle est souvent orné d'un paysage qui entraine le regard vers le lointain. C'est une fenêtre ouverte sur des rêves mythologiques...

Mon clavecin, lui, sera beau mais sobre. A l'intérieur du couvercle, la gomelaque laissera aparaître les veines du bois...

Puis je contemple mon oeuvre comme Perrette son pot au lait : pour un petit frère du Desruisseaux, il a plutôt l'air de sortir de chez Ikéa !

Mise en place des pointes où s'accrocheront les cordes (cela se fait à l'enfonce-pointe pour ne pas cogner au marteau sur la partie la plus sensible de l'instrument) puis perçage de trous à l'emplacement des chevilles.



Cordage : premiers sons ! 

Eperdu d'amour, je ne me lasse pas de gratouiller les cordes...

Ensuite, mise en place des registres où seront glissés les sautereaux...

Découpe des sautereaux à la bonne longueur... 

et...   BOURDE !  

Il faut poncer légèrement le corps des sautereaux pour qu'ils coulissent aisément dans les registres, mais s'il y a trop de jeu c'est la cata, le clavecin sera impossible à harmoniser.
La ponçeuse électrique étant d'une efficacité proprement redoutable, il ne me restera plus qu'à téléphoner à Klinkhamer. 


"allo, Joop ? Tout va très bien et je n'ai fait aucune bêtise, mais je me disais que ce serait bien d'avoir une vingtaine de sauteraux de rechange, juste par sécurité..."

Mise en place de vis de réglage sous les sautereaux.

Fixation des pointes sur le sillet (avec un gabarit car l'espacement régulier entre les cordes en dépend),

réglages avant l'harmonisation,

Et voilà le clavecin dans mon studio lyonnais !

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